Porté par la CMA France*, le projet MADAME s’était donné comme mission d’accompagner et d’encourager la mixité professionnelle en milieu rural. Le 15 décembre dernier à Paris, un séminaire de clôture fut l’occasion de dresser le bilan des actions réalisées.
En avril 2021, des élèves en Bac pro Services à la personne et au territoire (SAPAT) à la MFR de La Palma (69) et à la MFR de Châteauneuf-sur-Isère (26) ont été formés aux outils développés dans le cadre du projet MCDR MADAME. © photo : CMA Auvergne-Rhône-Alpes
« L’égalité professionnelle dans les métiers de l’agriculture et de l’artisanat recouvre des enjeux majeurs pour la société d’aujourd’hui et de demain » rappelle Marianne Villeret, cheffe du service Politiques territoriales et Financement publics à CMA France, présente lors de la matinée. Un constat partagé par l’ensemble des intervenants, à l’instar de Joël Fourny, président de CMA France qui a inauguré l’événement ou de Françoise Liébert, Haute fonctionnaire en charge de l'égalité des droits femmes/hommes et de la diversité au ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation qui a tenu à rappeler qu’« à l’heure où la reprise d’exploitations par la jeune génération fait souvent défaut, la féminisation des métiers est plus que jamais un atout… »
« Cet événement aura été également l’occasion de tirer un bilan des actions menées dans le cadre de notre MCDR depuis septembre 2018, poursuit Marianne Villeret. La première phase a étudié les freins à la mixité. Nous avons réalisé des enquêtes auprès de différents groupes d’acteurs : jeunes, apprentis, chefs d’entreprises, maîtres d’apprentissage, centre de formation ou collectivités locales. » Cela a permis de mettre en lumière les obstacles rencontrés par les apprenties et les cheffes d’entreprises rurales : « Il s’agissait d’identifier les métiers et les profils genrés dans les secteurs de l’artisanat et de l’agriculture ainsi que les difficultés rencontrées par les femmes tout au long de leur carrière professionnelle. » Ces difficultés s’ajoutent à celles rencontrées par les femmes rurales, soulignées par Françoise Liébert : « Un moindre accès aux services, à la culture, à la formation continue, un isolement accru qui entrave l’ouverture à d’autres modes de vies et majore le risque de violences intrafamiliales ainsi que les problématiques propres aux territoires ruraux : pénurie de services publics, difficultés de gardes d’enfants, etc. »
Cette enquête n’aurait pu voir le jour sans les 47 jeunes de MFR mobilisés pour réaliser les entretiens. « Il nous semblait primordial d’impliquer la jeunesse dans ce processus de compréhension de l’impact des stéréotypes de genre dans l’artisanat et l’agriculture, explique Marianne Villeret. Ils ont mis au point le questionnaire, interrogé les femmes cheffes d’entreprises et consolidé les résultats. »
« Les stéréotypes noués dans l’enfance influencent plus tard notre orientation professionnelle, poursuit la chargée de mission à CMA France. Non seulement les métiers, mais les compétences elles-mêmes sont considérées comme féminines ou masculines. » Les étapes suivantes du projet MADAME ont consisté à expérimenter et déployer des actions de sensibilisation et de promotion favorisant la mixité des métiers, dont certaines adressées aux jeunes, de la maternelle au collège, et aux apprentis. « Nous avons organisé des débats avec les apprentis, accompagnés d’une compagnie de théâtre qui est venue représenter une pièce sur les relations de travail et l’égalité professionnelle au sein des petites entreprises. »
« La vision genrée des métiers s’ancrent dès le plus jeune âge et les enfants forment souvent un public réceptif, ouvert, comme nous avons pu l’observer lors de notre atelier "Éveil aux métiers de l’artisanat et de l’agriculture". » Mené auprès de plus de 300 élèves de maternelle et de primaire, cet atelier pédagogique a été conçu comme une activité ludique, mêlant jeux de mémorisation, cartes, contes, jeu de l’oie…
Pour combattre efficacement les inégalités et les freins à la mixité entres hommes et femmes, MADAME a également cherché à sensibiliser les enseignants et les encadrants sur les questions d’orientation non-genrée. Sept formations ont ainsi été organisées (en présentiel ou à distance), lesquelles ont rassemblé près de 100 enseignants de collège, lycée et MFR. « L’idée était d’interroger les biais psychologiques dans notre perception du genre, grâce notamment à l’accompagnement d’un docteur en psychologie cognitive », précise Marianne Villeret.
Une formation spécifique, à destination des agents de CMA et de Chambres d’agriculture en charge de l’orientation et de l’aide à la décision des jeunes, doit permettre de déployer l’ensemble des outils d’orientation conçus dans le cadre du projet. Un guide intitulé « S’orienter sans préjugés vers l’artisanat » existe d’ores et déjà, édité à 650 exemplaires papier et disponible en ligne. Il informe les jeunes sur les différents métiers de l’artisanat, les diplômes envisageables ainsi que les démarches de prises de contact avec les entreprises.
Au total, 25 interventions impliquant plus de 700 participants ont pu être réalisées dans les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur.
La matinée s’est conclue avec l’intervention de Fabienne Munoz, maître artisane coiffeuse et présidente de la CMA de l’Ardèche. Elle a partagé ses réflexions sur l’entreprenariat, un domaine dans lequel les femmes s’illustrent de plus en plus, mais où, comme dans tant d’autres, il reste encore à faire bouger les lignes…
* en partenariat avec la Chambre de Métiers et de l’Artisanat (CMA) Auvergne-Rhône-Alpes, la Chambre d’agriculture du Rhône, la Fédération régionale des Maisons Familiales Rurales des régions Auvergne Rhône Alpes (MFR) et Provence-Alpes-Côte d’Azur
Réseau rural français - Kogito