Le 2 février, le Groupement d’intérêt scientifique (GIS) « Relance Agronomique » organisait la 11e journée CASDAR. Consacrée aux relations entre l’agriculture et la biodiversité, elle s’est articulée autour de présentations de 12 projets financés par le CASDAR et d'une conférence de Gilles Bœuf, professeur émérite spécialiste de la physiologie environnementale et de la biodiversité.
Agriculture et biodiversité : une relation gagnant-gagnant. Voilà en résumé la teneur des échanges qui se sont tenus le 2 février dernier à l’occasion de la journée CASDAR1 2022. Après une édition 2021 consacrée à la contribution de l'agriculture à l'atténuation du changement climatique, ce 11e rendez-vous des projets CASDAR s’est penché sur les liens entre agriculture et biodiversité, thème prioritaire du PNDAR 2022-2027. Organisé en distanciel par le Groupement d’intérêt scientifique (GIS) « Relance Agronomique » l’événement s’est articulé autour de quatre sessions thématiques consacrées à la diversité génétique, au développement de la biodiversité à l’échelle de l’entreprise agricole, aux démarches collectives en faveur de la biodiversité et à la sensibilisation aux enjeux de la biodiversité. Chaque session a été l’occasion de découvrir les résultats et enseignements de projets financés par le CASDAR (voir encadré). Portant sur des sujets comme la mycorhization, la préservation des ressources génétiques, l’association de cultures ou l’accueil des pollinisateurs, ces projets ont illustré la relation bénéfique entre l’agriculture et le vivant : d’un côté l’agriculture, si raisonnée, contribue à protéger, restaurer et enrichir la biodiversité ; de l’autre le vivant se révèle un allié puissant de l’agriculture. « Une grande biodiversité augmente la productivité ainsi que les capacités à réagir face aux espèces invasives » a ainsi souligné Gilles Bœuf, professeur émérite à Sorbonne Université et membre du conseil scientifique de l’Office Français de la Biodiversité. Le spécialiste de la physiologie environnementale et de la biodiversité était le grand témoin de la journée.
Le CASDAR finance trois types d’action
Gilles Bœuf a initié les échanges par une conférence sur les enjeux liés à la biodiversité et du lien avec l’agriculture. Implacable sans être pessimiste – « il est trop tard pour l’être, maintenant il faut agir », l’ancien président du Muséum national d’Histoire naturelle a rappelé que nous traversons une crise globale : « Le vivant sauvage décline à un rythme sans précédent mais on parle huit fois moins de la biodiversité que du climat. C’est le même combat : 2°C de plus et nous perdons les récifs coralliens qui abritent plus d’un tiers des espèces connues. » Il assure ensuite que les agriculteurs ont un rôle essentiel pour maintenir et restaurer la biodiversité tout en soulignant que le vivant peut aider le monde agricole à s’adapter aux impacts du changement climatique. Il invite notamment à s’intéresser au biomimétisme c’est-à-dire à s’inspirer des formes du vivant, ses mécanismes, ses matériaux, ses relations durables ou son interdisciplinarité pour innover. « L’enjeu de l’agriculture dans la biodiversité se passe au niveau du sol, insiste enfin Gilles Bœuf. On ne peut pas imaginer alimenter huit milliards d’humains avec des sols morts. Il faut ramener des bactéries, des champignons, des tardigrades, des acariens, des lombrics… »
Les 9 défis du monde agricole selon Gilles Bœuf
• Nourrir, demain, neuf milliards d’humains • Produire plus, sans augmenter les surfaces agricoles • Ne plus gaspiller l’eau • Arrêter l’usage des pesticides et insecticides dangereux et diminuer les engrais |
• Produire des produits sains • Ne pas détruire la biodiversité mais en tirer parti • Développer les polycultures • Ramener de la vie dans les sols • Créer de l’emploi |
Le reste de la journée CASDAR s’est articulé autour des présentations de 12 projets financés par le CASDAR. Portés par des instituts techniques, des chambres d’agriculture, des groupes ou coopératives d’agriculteurs, les projets sont conduits en partenariat avec des organismes de recherche ou des établissements d’enseignement supérieur et technique. Ils ont par exemple permis d’apporter des connaissances nouvelles sur les symbioses mycorhiziennes (projet MYCOAGRA), de créer des infrastructures agronomiques comme des couverts floristiques (Api-soja) et des corridors de biodiversité (GIEE AOC Margaux, GIEE Tilloy-Bellay), ou de préserver des races locales (GIEE Optimiser la conduite des races locales). De nombreux outils produits dans le cadre d’actions CASDAR ont également été présentés. Ils visent à aider les agriculteurs comme BIOTEX (RMT Elevage et environnement), AgriBest (Programme de développement Chambre d'Agriculture) et le logiciel Mootic (Programme Génétique animale) ou à sensibiliser aux enjeux de la biodiversité comme RURALIS, un jeu de plateau développé dans le cadre du RMT Biodiversité et Agriculture. En conclusion de cette journée très riche, Christian Huyghe, directeur scientifique Agriculture à l’INRAE et président du GIS Relance Agronomique, a notamment souligné l’importance de développer nos connaissances scientifiques sur les mécanismes de fonctionnement de la biodiversité : « Nous devons avoir plus de certitudes et de preuves. C’est essentiel, notamment pour éclairer les pouvoirs publics et développer des politiques publiques cohérentes. »
1 Compte d’affectation spéciale pour le développement agricole et rural
Réseau rural français - Kogito